Avez-vous déjà décrit votre emploi et reçu comme réaction : « D’accord, mais pourquoi donc? »
Mes amis ou ma famille m’ont assez souvent posé cette question à propos de mon travail au sein de l’équipe de conservation des tortues de la Fédération canadienne de la faune.
Je crois que cette question est attribuable en partie au manque de sensibilisation à la conservation des tortues. Les huit espèces de tortues d’eau douce du Canada figurent sur la liste des espèces en péril. En fait, elles comptent parmi les espèces animales les plus menacées au pays. Or, si vous demandez à quelqu’un d’énumérer des espèces en péril au Canada, il y a de bonnes chances que la personne ne mentionne pas les tortues d’eau douce.
Comment peut-on aider les tortues d’eau douce?
À quoi servent les enquêtes routières?
L’incubation des œufs visant à réduire la prédation sur les nids est un concept facile à saisir par la plupart des gens. Ils comprennent bien aussi que la recherche de tortue mouchetée vivante (notre espèce témoin) dans les zones humides contribue à protéger légalement son habitat.
Ce sont les enquêtes sur la mortalité routière que les gens ont habituellement de la difficulté à comprendre. À quoi servent ces sondages? C’est chose établie : la mortalité sur les routes est l’une des principales causes du déclin de la population des tortues dans cette zone et patrouiller dans les routes ne permettra de sauver qu’un faible pourcentage des tortues s’apprêtant à traverser.
En effectuant des sondages routiers, nous essayons de déterminer où les tortues traversent la route habituellement (nous appelons ces endroits des points chauds) et s’ils changent d’une année à l’autre. L’information ainsi recueillie nous permet d’informer les municipalités des endroits qui nécessitent des mesures de prévention afin de sauver les tortues.
Panneaux routiers
« Alors vous marquez les endroits où des panneaux indiquant le passage de tortues doivent être installés? » C’est ce que l’on suppose la plupart du temps.
Bon, oui et non. Les panneaux sont une mesure préventive qui pourrait être prise. Nous avons étudié leur efficacité dans le cas des tortues au cours des deux dernières années et nous avons vu peu de changement en ce qui concerne le taux de mortalité sur les routes après leur installation.
Des études semblables ont été faites sur les panneaux pour d’autres types d’animaux. Malheureusement, les données indiquent qu’ils ne sont généralement pas très efficaces. Les conducteurs s’habituent rapidement aux panneaux d’avertissement et commencent à les ignorer peu après leur installation.
Quelles sont les mesures d’atténuation qui fonctionnent?
Les clôtures. Mais par n’importe laquelle.
La clôture doit comporter quatre caractéristiques importantes qui peuvent paraître évidentes, mais qui ne sont pas souvent prises en compte.
1. Il doit être impossible de grimper sur la clôture
Oui, les tortues peuvent grimper. Oui, elles tenteront de le faire. Oui, cela semble ridicule.
2. Il doit être impossible de creuser un tunnel sous la clôture
Bien que les tortues de l’Ontario soient, pour la plupart, adaptées à la vie dans l’eau, elles aiment curieusement creuser. Bien entendu, il est peu probable qu’elles puissent creuser plus de quelques pouces. Souvent, cela suffit pour se glisser sous une clôture qui n’est pas bien enfoncée dans le sol. De plus, elles sont des créatures très tenaces. Un peu de terre ne réussira pas à les dissuader.
3. La clôture ne peut être évitée
Un grand nombre d’entre nous ont sûrement vu des photos d’une porte sans clôture portant le panneau « svp fermez la porte ». Son inutilité nous a bien fait rire. Mais les clôtures typiques posent le même problème – il est possible de les contourner.
Les tortues sont tenaces et elles ont, en plus, beaucoup de temps. Si elles ne peuvent pas passer par-dessus la clôture, elles la contourneront. Ceci ne veut pas nécessairement dire qu’il faut clôturer tout habitat où les tortues pourraient vivre. Cela veut seulement dire que la clôture doit être assez longue et que ses extrémités doivent s’éloigner de la route afin de forcer la tortue à faire demi-tour. Ceci nous amène au dernier point.
4. Il doit y avoir une autre façon de traverser la route
Les tortues doivent, tout de même, se déplacer. Certaines espèces vivent dans des zones humides particulières à certaines périodes de l’année. Un moyen sans danger de traverser la route pourrait consister en un simple ponceau existant déjà à l’endroit en question ou une structure de passage construite sous la route spécialement conçue pour les animaux. Sans endroits sûrs où traverser, les tortues peuvent rester prisonnières à un endroit qui ne convient pas à leurs besoins changeants au cours de l’année.
Que pouvez-vous faire?
Dans un monde idéal, tous les tronçons de route désignés comme « zone dangereuse » seraient adaptés selon ces mesures d’atténuation. Il n’en est malheureusement pas le cas. Mais la FCF, en collaboration avec d’autres organisations qui partagent nos intérêts, y travaillons.
Entre-temps, vous pouvez prévenir la mortalité des tortues sur les routes en restant informé.
- Apprenez comment aider de façon sécuritaire une tortue à traverser une route
- Renseignez-vous pour savoir s’il y a un centre de réadaptation de la faune dans votre localité
- Respectez les panneaux routiers de passage pour les espèces sauvages
- Signalez les tortues que vous repérez (même celles qui sont mortes) à iNaturalist.ca
- Et surtout, RALENTISSEZ à proximité des zones humides
1 comment
J aimerais démarrer un programme de protection des tortues du Lac Beavan (Arundel, Quebec).
Pouvez-vous nous donner de l assistance technique? Nous avons des bénévoles.
Merci
Martin Bilodeau