Laissez-moi retrouver ma prairie, ma prairie et sa… multitude de canards.

Dans Almanach d’un comté des sables, ce classique d’histoire naturelle publié en 1949, Aldo Leopold décrit les grandes plaines de l’Amérique du Nord comme une « usine à canards ». C’est une étrange façon, quoique tout à fait appropriée, de décrire ce qui est communément considéré comme un écosystème sec. Cela tient au rythme incroyable, presque industriel, auquel les canards sont « fabriqués » dans les prairies.

Et le secret de cette réussite, ce ne sont pas les prairies en soi. La clé réside plutôt dans la géographie post-glaciaire unique de cette région, qui donne un terrain parsemé de petits étangs alimentés par les eaux de ruissellement, appelés « marmites torrentielles ». Ces petites zones humides sont généralement bordées de plantes aquatiques et d’arbustes épais. Elles constituent des habitats de nidification idéaux pour plusieurs dizaines d’espèces de canards, de foulques, d’oies, de grèbes et de hérons. Cette région de marmites torrentielles des prairies est la destination printanière de millions d’oiseaux aquatiques migrateurs, après avoir passé l’hiver le long de la côte, dans le golfe du Mexique, l’océan Atlantique et plus au sud.

Canard souchet @Ken Risi | Club de photographie de la FCF

La conservation des terres humides des prairies est l’une des réussites les plus révélatrices au monde. Des décennies de surveillance et de recherches démontrant le déclin de l’habitat des marmites torrentielles et des populations de sauvagine ont incité une coalition d’écologues, de propriétaires fonciers, de communautés autochtones et de groupes de chasse à faire pression sur les décideurs et les politiciens dans l’ensemble de l’Amérique du Nord pour que des mesures soient prises. Il en est résulté la signature d’un plan international de gestion de la sauvagine et l’adoption de la North American Wetland Conservation Act à Washington. Ces mesures politiques clés ont dynamisé des milliers d’initiatives à travers les Grandes Plaines. Au cours des quelque 35 années qui se sont écoulées depuis, les oiseaux aquatiques se sont remarquablement rétablis et sont maintenant le seul groupe d’oiseaux dont la population est à la hausse au Canada.

« Les oiseaux aquatiques se sont remarquablement rétablis et sont maintenant le seul groupe d’oiseaux dont la population est à la hausse au Canada. »
~ John Wilsmhurst

Qu’est-ce que cela signifie?  L’usine à canards des prairies a repris sa pleine production.

Si vous vous rendez dans les prairies en ce moment, vous aurez droit à un festin visuel de canards pilets, canards souchets, sarcelles et canards siffleurs. Faites une pause à côté d’une marmite torrentielle gonflée par l’eau de fonte nivale et l’écoulement printanier, écoutez le chant rouillé des carouges à tête jaune et observez une flottille de canetons sarcelles cannelles émerger des quenouilles. Au-dessus de nos têtes, un couple de canards souchets vire de bord, amorce sa descente et atterrit dans les eaux troubles de la prairie. Alors qu’au loin les engins agricoles d’un éleveur bovin font voler la poussière, un fuligule à tête rouge plonge pour se nourrir de plantes et d’insectes au fond d’une marmite torrentielle.

Grâce à des groupes de personnes visionnaires et passionnées comme vous, « l’usine à canards des prairies » tourne à plein régime et produit des cancaneurs vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Les réussites dans le domaine de la conservation sont du domaine du possible. La Fédération canadienne de la faune continue de défendre la conservation des prairies, des exploitations bovines et des terres humides dans la région des marmites torrentielles des prairies.

Apprenez-en plus sur la biodiversité des prairies indigènes du Canada >