« Puis-je avoir une tortue? »

Une question que de nombreux parents (y compris les miens) ont entendue sortir de la bouche de leurs enfants devant un aquarium de bébés tortues à l’animalerie. Et pourquoi pas? Les tortues en question sont souvent des tortues à oreilles rouges, pas plus grosses qu’une pièce d’un dollar. Elles ont des couleurs vives et sont absolument adorables dans le décor de l’aquarium. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner?

Beaucoup de choses, il se trouve.

Les animaux qui font de terribles animaux de compagnie sont terriblement envahissants

Ce type de situation pourrait décourager les espèces indigènes comme la tortue peinte du Centre (tortue du bas) de se prélasser lorsque des tortues à oreilles rouges (tortue du haut, au centre) sont présentes. ©Jason McCullough | iNaturalist.ca

 

Ce que les vendeurs omettent souvent de mentionner, c’est que les tortues font (pour la majorité des gens) de terribles animaux de compagnie. La plupart des espèces ont besoin d’un aquarium beaucoup plus grand que ce que les gens peuvent habituellement loger. Elles ont également besoin d’un éclairage spécial, et il y a de bonnes chances qu’elles vivent plus longtemps que vous si vous vous en occupez bien. Malheureusement, cette réalité crée une sorte de cercle vicieux selon lequel les gens achètent une tortue de compagnie, se rendent compte qu’ils ne sont pas en mesure de lui donner les soins adéquats et la relâchent dans la nature parce que les refuges qui acceptent des tortues ont déjà trop de tortues de compagnie non désirées.

Oh, et la tortue à oreilles rouges est l’espèce la plus envahissante de la planète. L’ai-je mentionné?

La tortue à oreilles rouges est originaire du sud des États-Unis, mais on la retrouve maintenant à l’état sauvage sur tous les continents, à l’exception de l’Antarctique. L’un des principaux problèmes liés à sa répartition non indigène est que cette espèce monopolise souvent les meilleurs endroits pour se prélasser. De nombreuses tortues ont besoin de se prélasser pour rester en vie, car cela leur permet de maintenir une température corporelle adéquate, de se débarrasser des sangsues et d’aider les femelles à développer leurs œufs. C’est d’autant plus vrai pour nos tortues canadiennes qui doivent composer avec un été relativement court.

Utilisation d’iNaturalist Canada pour étudier la tortue à oreilles rouges envahissante au Canada

Ce type de situation pourrait décourager les espèces indigènes comme la tortue molle à épines (tortue du bas) de se prélasser lorsque des tortues à oreilles rouges (tortue du haut) sont présentes. ©Joanne Redwood | iNaturalist.ca

Afin de déterminer si la tortue à oreilles rouges représente un risque pour les tortues canadiennes, nous avons fait appel à iNaturalist Canada pour étudier les relations entre cette espèce et nos tortues indigènes. iNaturalist est une plateforme de science citoyenne où tout le monde peut publier des photos et l’emplacement d’espèces indigènes ou exotiques. Un logiciel de reconnaissance de photos et d’autres utilisateurs aident à identifier les espèces observées, et les chercheurs peuvent ensuite utiliser ces données dans le cadre de leurs recherches.

L’équipe de la FCF consacrée aux tortues a d’abord examiné si les tortues à oreilles rouges se prélassent seules ou en groupe et, si elles sont en groupe, avec qui elles se prélassent. Nous avons répété le processus avec la tortue peinte indigène et nous avons ensuite comparé les résultats. Il s’avère que la tortue à oreilles rouges a tendance à se prélasser seule, mais peut également se prélasser avec des espèces de tortues indigènes. iNaturalist a observé des tortues à oreilles rouges se prélassant avec de nombreuses espèces de tortues indigènes, dont des tortues peintes, des tortues mouchetées, des tortues géographiques et même des tortues serpentines! Nous avons même trouvé quelques photos de tortues peintes se prélassant sur des tortues à oreilles rouges!

Certaines tortues à oreilles rouges, comme celle dans cette photo (la plus grosse tortue au centre) n’ont aucun problème à se prélasser aux mêmes endroits que les tortues indigènes (tortues peintes du Centre). ©Andrea Kingsley | iNaturalist.ca

Qu’est-ce que tout cela signifie pour l’avenir de nos tortues indigènes? Nos résultats ne sont pas concluants, mais ils suggèrent que les tortues à oreilles rouges partageront les sites de prélassement avec les espèces de tortues indigènes, au moins une partie du temps. Ça ne veut pas dire qu’il est acceptable de relâcher une tortue de compagnie dans la nature – elle peut toujours causer des dommages de façon moins directe. Les espèces exotiques peuvent facilement propager des maladies ou des parasites exotiques et peuvent interagir avec les espèces indigènes d’une manière qui n’est pas immédiatement évidente. Par exemple, on a observé des tortues à oreilles rouges qui mangeaient les jeunes tortues d’autres espèces.

C’est pourquoi nous vous recommandons vivement de faire vos recherches avant d’acquérir un nouvel animal de compagnie et de ne JAMAIS le relâcher dans la nature. Mais si vous souhaitez avoir une tortue comme animal de compagnie, pourquoi ne pas essayer d’en adopter une qui a besoin d’un nouveau foyer? Vous pouvez également aider en vous inscrivant à iNaturalist et en signalant ce que vous voyez, qu’il s’agisse d’une espèce indigène ou non. Ainsi, les chercheurs pourront suivre la propagation et les effets des espèces non indigènes. Vous pouvez également consulter notre article qui présente l’ensemble de nos résultats!

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