Au cours des trois dernières années, l’équipe des tortues de la FCF a rapporté plus de 1400 tortues tuées sur les routes de l’est de l’Ontario.
Il s’agit d’une quantité phénoménale de tortues tuées sur les routes, qui n’est probablement pas durable. La majorité des tortues mortes que nous avons trouvées étaient des tortues peintes, mais nous avons aussi trouvé de nombreuses chélydres serpentines et tortues mouchetées. Étant donné que toutes les tortues d’eau douce du Canada sont des espèces en péril, la mortalité routière représente une menace sérieuse pour elles.
Pourquoi cartographier la mortalité routière des tortues?
L’objectif de la documentation de la mortalité routière des tortues n’est pas uniquement d’apprendre combien de tortues sont tuées sur les routes, mais d’identifier les zones clés dans lesquelles nombre d’entre elles sont tuées. Une fois ces points chauds identifiés, nous pouvons essayer d’y travailler pour prévenir la mortalité routière.
Nous nous sommes concentrés sur l’identification des points chauds pour la tortue mouchetée, car cette espèce est en voie de disparition à l’échelle nationale et la mortalité routière est pour elle une menace clé. Les deux pires points chauds pour les tortues mouchetées que nous avons définis se trouvent le long d’une route provinciale à proximité d’Ottawa. En 2017 seulement, l’un des points chauds comptait huit tortues mouchetées et l’autre quatre.
Nous n’avons trouvé que 69 tortues mouchetées sur l’ensemble des routes en 2017, de sorte que ces deux points chauds, d’une longueur de quelques centaines de mètres seulement chacun, comptabilisaient plus de 15 % de toutes les tortues mouchetées trouvées cette année-là. Nous y avons également trouvé d’autres types de tortues, soit un total de 27 tortues dans ces deux points chauds en 2017 seulement. Et nous n’avons probablement pas trouvé toutes les tortues tuées sur cette route, car nous ne l’avons inspectée qu’environ une fois par semaine.
Quelle est la solution? Des clôtures de protection des tortues
Nous avons travaillé avec le gouvernement provincial sur cette question et nous sommes heureux d’annoncer que des clôtures de protection de la faune ont maintenant été installées au niveau de ces deux points chauds. Vous avez peut-être des questions au sujet des clôtures de protection de la faune.
Voici quelques questions et réponses courantes :
1. Comment fonctionnent les clôtures de protection de la faune?
Les clôtures sont installées des deux côtés de la route pour empêcher les tortues (et autres animaux sauvages) d’y accéder. Le bas des clôtures est enfoui dans le sol pour empêcher les animaux de ramper dessous. Nous avons la chance que ces deux points chauds se situent le long de tronçons de route sans voie d’accès. La présence d’une voie d’accès rendrait impossible l’installation d’une clôture continue le long d’une route. S’il y a un espace dans une clôture, les animaux se rendront probablement sur la route et se feront frapper par des voitures.
2. Les clôtures maintiennent les animaux sauvages à l’écart de la route, mais ne les empêchent-elles pas également de se déplacer là où ils veulent se rendre?
Oui, les clôtures limitent probablement les déplacements, mais nous avons également la chance que nos deux points chauds sont équipés de ponceaux sous la route. Ces ponceaux sont des buses en tôle ondulée d’environ un mètre de diamètre. Il a été bien documenté que de nombreuses espèces, parmi lesquelles les tortues, se déplacent à travers les ponceaux pour se rendre de l’autre côté des routes. Aussi, les clôtures garderont les tortues à l’écart de la route et les ponceaux permettront à au moins certaines d’entre elles de se déplacer sous la route pour se rendre de l’autre côté.
3. Si les animaux sauvages se déplacent dans les ponceaux, pourquoi se donner la peine d’installer des clôtures?
Si elles ont le choix, les tortues essaieront de traverser la route plutôt que de pénétrer dans un tunnel sombre. Si une clôture est installée le long de la route, les tortues n’ont pas le choix. Si elles veulent traverser la route, elles doivent emprunter les ponceaux. Certaines tortues peuvent refuser cette option, mais les études de recherche indiquent que beaucoup utilisent ces ponceaux. Il peut donc être plus difficile de se rendre de l’autre côté de la route, mais cela reste possible et c’est beaucoup plus sécuritaire.
4. Qu’est-ce qui empêche les tortues de contourner l’extrémité des clôtures?
Les clôtures mises en place dans le cadre de projets de protection de la faune se terminent dans les sections les plus inaccessibles. Les clôtures doivent être plus longues que le point chaud lui-même, afin de limiter le risque que les tortues les contournent.
Idéalement, les extrémités des clôtures peuvent être fixées à d’autres éléments comme des affleurements rocheux agissant comme un obstacle naturel. Ce n’est souvent pas possible, aussi l’autre option consiste-t-elle à courber les clôtures sur elles-mêmes. En théorie, cette technique permet de guider les tortues à l’écart de la route.
Si les clôtures sont suffisamment longues, elles peuvent régler le problème de mortalité routière. Parfois, les clôtures peuvent réduire considérablement la mortalité routière, sans l’éliminer complètement. Quoi qu’il en soit, cette initiative est une réussite.
Quelle est la prochaine étape? La surveillance
Nous prévoyons d’assurer le suivi de l’efficacité de ces clôtures au niveau de ces deux points chauds en 2020 pour nous assurer qu’elles fonctionnent. Étant donné que les clôtures résisteront pendant des décennies, celles qui sont établies au niveau de ces deux points chauds sauveront la vie de centaines de tortues et de centaines d’autres animaux sauvages au cours des prochaines années.
Il s’agit d’une réussite majeure pour la conservation des tortues, mais de nombreux kilomètres de routes continuent à représenter une menace, aussi continuerons-nous à installer davantage de clôtures pour la protection de la faune au niveau des principaux points chauds. Il n’y a pas de raison que nous n’ayons pas des routes sécuritaires à la fois pour les gens et les animaux sauvages.