L’un des avantages de travailler pour la Fédération canadienne de la faune est qu’on ne sait jamais sur quoi on peut tomber.
Cette histoire particulière a commencé en 2018. Nous étions au milieu d’une étude sur les tortues tuées sur les routes lorsque nous avons trouvé une tortue morte et que nous ne pouvions pas identifier l’espèce.
« Pourrait-il s’agir une tortue musquée? » ai-je demandé.
Je me suis heurtée à une réponse catégorique : « Non, nous sommes trop loin de l’eau ».
Le lendemain matin, après avoir consulté des guides d’excursion, il s’est avéré qu’il s’agissait en fait d’une tortue musquée.
Mais cette découverte fortuite a soulevé la question suivante : cette espèce est-elle plus terrestre qu’on ne le pense?
La tortue musquée est une espèce extrêmement aquatique qui quitte rarement l’eau. Lorsque les terres humides se dessèchent, on l’a observée en train d’effectuer des déplacements terrestres de moins de 50 mètres. Il est donc rare qu’elle se déplace sur une distance de 180 mètres, soit la distance que notre tortue musquée a parcourue à partir du plan d’eau le plus proche. Même en élargissant notre recherche pour inclure les rapports où l’on ne savait pas comment ou pourquoi la tortue était là (les aigles et autres prédateurs sont connus pour les emporter), notre observation correspondait à l’un des plus longs déplacements terrestres signalés. Les études détaillées sur les déplacements terrestres de cette espèce sont plutôt rares. Il est tout à fait possible que nous n’ayons pas encore observé les plus longs déplacements de cette tortue sur terre.
Une nouvelle façon de comprendre les déplacements de la tortue musquée
Nous nous sommes alors tournés vers un autre outil pour étudier les déplacements terrestres de cette espèce : les données d’iNaturalist Canada. iNaturalist Canada est une plateforme scientifique communautaire qui permet aux gens de signaler leurs observations d’espèces. La plateforme permet d’identifier l’observation à l’aide d’un logiciel de reconnaissance de photos et des commentaires d’autres utilisateurs. Elle aide également les chercheurs comme nous à étudier la répartition spatiale et les tendances relatives à une grande variété d’espèces.
Au moment de l’analyse, iNaturalist comptait plus de 400 observations confirmées de tortues musquées au Canada. Nous avons pu identifier avec suffisamment de précision spatiale 15 cas de tortues musquées retrouvées sur des routes à plus de 25 mètres de l’eau. Nous avons considéré les distances inférieures comme des déplacements mineurs. Parmi ces observations, huit se trouvaient à 100 mètres ou plus de l’eau et une à plus de 300 mètres d’un cours d’eau.
Bien que ces données ne soient pas concluantes, elles nous indiquent que ces tortues ont effectué un très long voyage terrestre. Elles ont soulevé plusieurs questions : les tortues se sont-elles déplacées sur de telles distances en raison de précipitations? Se déplaçaient-elles entre deux plans d’eau? Si c’est le cas, le plan d’eau le plus proche se trouvait généralement à plus de 300 mètres – exploraient-elles simplement la région autour de leur habitat? Il s’agit tout de même d’une très longue marche pour une tortue qui pourrait facilement tenir dans votre main.
Il y reste certainement du travail à faire, mais les données indiquent que cette petite tortue énigmatique est plus mobile sur terre qu’on ne le pensait au départ. Vous pouvez lire l’article complet (en anglais seulement) sur le site Web Aidons les tortues.
Si vous avez trouvé notre travail avec les données de la communauté de citoyens scientifiques intéressant, pourquoi ne pas créer un compte dans iNaturalist? C’est gratuit et vos observations nous aident à mieux comprendre notre faune indigène. De plus, vous pouvez en apprendre davantage sur les espèces présentes dans votre région!