Leur population est en voie d’extinction en raison de quatre menaces
En 2018, nos cœurs se sont brisés en apprenant que Talequah, une orque, avait porté son bébé mort pendant plus de deux semaines avant de le laisser sombrer dans les profondeurs de l’océan. La perte était incommensurable pour Talequah, mais aussi pour chacun·e d’entre nous. Avec seulement 73 spécimens encore de ce monde, le fait de savoir que la vie de la population entière des épaulards résidents du Sud ne tient plus qu’à un fil est d’autant plus déchirant. Alors, à quelle réalité sont-ils confrontés?
La consanguinité
La population des épaulards résidents du Sud est tellement restreinte que cette espèce n’a d’autres choix que de se perpétuer par la reproduction consanguine. Malheureusement, cette situation a entraîné des répercussions très graves. Une étude récente conduite par l’organisation environnementale The Nature Conservancy et par l’Institut de génomique de Pékin (Beijing Genomics Institute, BGI) a décodé l’ADN d’approximativement 100 spécimens de cette population (certains d’entre eux sont morts entre-temps). Ces organismes ont découvert que la consanguinité rend en effet les épaulards résidents du Sud encore plus vulnérables aux maladies et à d’autres sources de risques pour leur santé. Une chute vertigineuse de leur nombre en a résulté. Les chercheurs et chercheuses ont constaté que les épaulards présentant un degré de consanguinité très élevé avaient moins de 50 pour cent de chances de survivre à leurs périodes de reproduction par rapport à ceux qui n’ont pas de tels liens entre eux. En outre, les femelles de cette population (qui ne survivent pas toujours à leurs périodes de reproduction en raison de cette consanguinité) ne donnent naissance qu’à approximativement 1,6 petit au cours de leur vie.
Une alimentation pauvre en lipides
Le saumon du Pacifique est sans aucun doute la nourriture préférée de l’épaulard. Hélas, la population résidente du Sud fait face à une pénurie alimentaire depuis plus de cinq ans. De plus, certains saumons du Pacifique ont une plus forte teneur en calories que d’autres. À son arrivée au début du printemps, le saumon du Pacifique est plus riche en lipides (en graisse). Les spécimens présents plus tard dans la saison sont plus pauvres en lipides. D’après vous, quels spécimens nos épaulards résidents du Sud ingurgitent-ils? Vous l’avez deviné. Ceux les plus pauvres en lipides. La triste réalité est que, sur une seule année, nos épaulards auraient besoin de manger environ 80 000 saumons du Pacifique pauvres en lipides de plus pour obtenir la valeur nutritive équivalente qui leur est nécessaire s’ils pouvaient avoir simplement accès au saumon présentant une teneur élevée en lipides en premier lieu.
Les polluants toxiques
Des scientifiques ont découvert plusieurs polluants chimiques dans les corps d’épaulards en Colombie-Britannique. Cependant, parmi les produits chimiques trouvés, celui le plus inquiétant et le plus fréquent, est le 4-nonylphénol (4NP), un composé souvent utilisé pour la fabrication du papier hygiénique ainsi que du savon et des détergents. Le fait que 46 pour cent des polluants présents dans le corps de ces épaulards appartiennent à ce composé est vraiment désastreux. Le fait que ce polluant est en mesure de toucher au système nerveux et d’interférer avec les fonctions cognitives devrait en effet collectivement nous inquiéter. Comment cette substance se retrouve-t-elle à l’intérieur du corps de ces épaulards? L’eau de ruissellement. Lorsque l’industrie utilise ce composé, ce dernier peut facilement se disperser dans nos océans par le biais des égouts et du ruissellement en général. Ensuite, les petits organismes vont ingérer ce produit chimique, puis lentement, mais sûrement, le 4NP va se frayer un chemin dans la chaîne alimentaire.
La pollution sonore
Saviez-vous que les épaulards sont des animaux extrêmement sociables? C’est vrai. Des groupes peuvent être constitués de dizaines de spécimens. Et communiquer les uns avec les autres est de la plus grande importance pour leur survie. Chaque groupe a son propre dialecte et s’exprime avec un ensemble de claquements et de sifflements uniques. Ce dialecte est employé pour chasser en équipe : rassembler des saumons du Pacifique est beaucoup plus aisé lorsqu’un groupe d’épaulards réuni à cet effet œuvre de concert. Cependant, les épaulards ne peuvent parvenir à leurs fins sans entendre les sons émis par les uns et par les autres. Et là est le problème. La pollution sonore vient compromettre leur capacité à communiquer. Des chercheurs et chercheuses ont constaté que la pollution sonore pouvait complètement déstabiliser des mammifères marins comme les épaulards : ces derniers ont été observés en train d’adopter des comportements étranges après avoir été exposés à une pollution par le bruit. Un bon exemple est l’augmentation spectaculaire du nombre d’épaulards qui se sont échoués (126 spécimens) entre 1950 et 2004 après que lesdits mammifères aient été perturbés par des sonars de haute puissance.