L’origine de la transmission des virus demeure un véritable mystère.
Alors que les chauves-souris sont vues d’un mauvais œil depuis qu’elles sont perçues comme étant la cause probable du virus derrière la COVID-19, nous en savons en fait toujours bien peu sur l’origine de la transmission des virus tels que le SARS-CoV-2. Il se pourrait bien que les chauves-souris deviennent une source d’indices majeure pour la découverte d’un traitement aux infections virales au fur et à mesure que nous avancerons dans les recherches sur ce sujet.
Les coronavirus font partie de plus de 200 espèces de virus réputés pour infecter les humains, et de près d’une centaine de milliers de virus qui touchent les autres mammifères. Seulement une fraction de ceux-ci causent des maladies, et d’autres sont même bénéfiques pour nous. En effet, certains de ces virus peuvent nous immuniser contre d’autres virus. Par exemple, un organisme infecté par le pegivirus sera mieux protégé contre le SIDA et d’autres sortes d’infections bactériennes, comme la peste bubonique.
Quatre types de coronavirus
Les scientifiques ont déterminé qu’il existe quatre types de coronavirus : alpha, bêta, gamma et delta.
- Les coronavirus alpha and bêta touchent les mammifères
- Les coronavirus gamma et delta infectent principalement les oiseaux
Nous connaissons sept espèces de coronavirus qui peuvent infecter les êtres humains, dont quatre sont en permanence parmi nous; elles sont dites « endémiques ». Ces quatre coronavirus incluent deux coronavirus alpha. On croit que ceux-ci proviennent des chauves-souris. Ensuite, il y a également deux coronavirus bêta qui seraient d’abord apparus chez les rongeurs. Ils sont associés à quelques symptômes cliniques légers chez les humains et sont connus comme étant la cause la plus fréquente des rhumes.
On pense que ces quatre coronavirus endémiques ont été transmis aux êtres humains dans un passé lointain par des hôtes intermédiaires, en particulier des animaux domestiqués, tels les bovins, les porcs ou les chameaux. Étonnement, nos cousins les grands singes et autres primates ne semblent pas avoir de coronavirus spécifiques. Cela peut s’expliquer par le fait que, contrairement à nous, ils ne sont pas en contact fréquent avec des animaux domestiques.
Les trois coronavirus dangereux pour les humains
Les trois autres coronavirus bêta pouvant infecter les êtres humains ne sont pas aussi inoffensifs qu’un simple rhume : le MERS-CoV cause le syndrome respiratoire du Moyen-Orient, le SRAS-CoV est la source du syndrome respiratoire aigu sévère, et le SRAS-CoV-2 provoque la COVID-19. Heureusement, le MERS-CoV et le SRAS-CoV ne semblent pas être endémiques et leur circulation est limitée. En revanche nous n’avons aucune idée combien de temps le SRAS-CoV-2 demeurera parmi nous. Chacun de ces virus provient peut-être des chauves-souris et a probablement été transmis aux humains par le biais d’animaux intermédiaires, mais nous n’arrivons pas à mettre le doigt sur l’origine du SRAS-CoV-2.
Devrions-nous avoir peur des chauves-souris?
Est-ce que cela veut dire que nous devrions avoir peur des chauves-souris? Bien sûr que non! Aucun coronavirus lié au SRAS ne provient des chauves-souris vivant dans les Amériques. Elles sont connues pour héberger les coronavirus alpha, mais les cas de coronavirus bêta sont extrêmement rares.
En fait, les humains agissant comme vecteurs de transmission du virus représentent une plus grande source d’inquiétude pour les scientifiques que les chauves-souris en Amérique du Nord. En contraste, une panoplie de coronavirus alpha et bêta ont été découverts chez les chauves-souris d’Eurasie, incluant celles de Chine. Cependant, les précédentes pandémies de coronavirus ont toutes été transmises aux humains par le biais d’un hôte intermédiaire, et non d’un contact direct entre les chauves-souris et les humains.
Pourquoi les chauves-souris de l’Amérique du Nord ne transportent-elles pas de coronavirus SRAS?
Une des raisons principales concernant la différence derrière cette diversité de virus est le grand écart entre le nombre d’espèces de chauves-souris trouvées en Asie comparativement à celles vivant en Amérique du Nord.
Il existe au moins 147 espèces en Chine seulement, ce qui représente l’endroit comprenant la plus grande diversité de chauves-souris dans le monde. En comparaison, il n’y a que 19 espèces de chauves-souris au Canada, et 44 en Amérique du Nord.
Cette différence est importante, car une récente étude scientifique démontre que le nombre de virus associés à un groupe spécifique d’oiseaux ou de mammifères dépend du nombre d’espèces dans chaque groupe. Plus le nombre d’espèces dans un groupe animal est élevé (les chauves-souris dans ce cas-ci), plus le nombre d’espèces de virus est élevé.
Les chauves-souris peuvent nous aider à produire de nouveaux traitements
En comprenant comment et pourquoi les chauves-souris peuvent tolérer ces virus sans en ressentir les effets négatifs, nous pourrions être en mesure de découvrir de nouveaux traitements pour les infections virales.
Comment y parviennent-elles?
Une hypothèse veut que les chauves-souris aient adopté au cours de leur évolution une immunité aux dommages tissulaires lorsqu’elles sont exposées à des agents stressants externes tels que les virus. Cette caractéristique a peut-être été acquise pour répondre aux dépenses énergétiques élevées lorsqu’elles se déplacent dans les airs, ce qui peut causer des dommages à l’ADN.
Les chauves-souris sont les seuls mammifères capables de voler. Lorsqu’elles volent, elles consomment quatre fois plus d’oxygène qu’au repos. Une diminution de la réaction immunitaire peut prévenir l’inflammation, une cause importante des dommages tissulaires durant une infection, et peut contribuer à augmenter leur durée de vie; certaines d’entre elles peuvent vivre jusqu’à 41 ans!
De nouvelles recherches sur les réactions immunitaires des chauves-souris aux infections virales et sur leur tolérance aux infections pourraient nous aider à développer des traitements aux infections virales pour les humains.
Un long chemin à parcourir
Nous avons encore beaucoup à apprendre sur la biodiversité des virus chez les mammifères. Par exemple, deux des quatre coronavirus endémiques affectant les êtres humains ont seulement été découverts après que de nouvelles recherches aient été effectuées à la suite de la propagation de l’épidémie du SRAS-CoV en 2003.
Chaque année, les populations humaines croissantes empiètent de plus en plus sur les espaces naturels, transformant les interactions entre la faune, les animaux domestiques et les humains. Ces interactions, couplées aux voyages internationaux, représentent de nouveaux moyens de transmission pour les microbes et les virus. En revanche, tant de choses résident toujours dans l’inconnu.
La pandémie actuelle a suscité des niveaux de collaboration sans précédent entre les scientifiques et les instituts de recherche, ce qui a mené à de nouvelles découvertes sur les virus. Financer la recherche continue sur la faune est essentiel si l’on souhaite mieux comprendre la propagation des virus entre les animaux ainsi que les différents types de virus qui apparaissent naturellement dans la faune. De plus amples connaissances nous permettront de retracer les voies de transmission entre les animaux, et, espérons-le, de prévenir ou d’atténuer les prochaines épidémies de virus.