Le Canada abrite une multitude d’espèces sauvages, dont bon nombre sont en voie de disparition.

Le Canada compte huit espèces de tortues d’eau douce, et toutes sont considérées comme étant en péril. Le déclin des populations de tortues, tant au pays qu’à l’échelle internationale, est directement lié à l’activité humaine. L’industrialisation et l’étalement urbain y contribuent, tout comme la mortalité routière.

Même si les routes sont des infrastructures essentielles, il est important de faire preuve de prudence — même en zone rurale. Ces routes traversent souvent ou longent des milieux humides où vivent des tortues. Résultat : ces dernières doivent souvent traverser des routes dangereuses pour passer d’un marais à l’autre ou pour aller pondre, un périple qui se révèle souvent fatal.

Carte montrant où la FCF a recensé plus de 1 400 tortues mortes sur les routes de l’est de l’Ontario (juin 2020)

Selon les recherches menées par David Seburn de la Fédération canadienne de la faune, plus de 2 000 tortues ont été retrouvées mortes sur les routes de l’est de l’Ontario entre 2017 et 2024.

La mortalité routière est un facteur important du déclin des populations de tortues, car elle touche souvent des individus ayant atteint la maturité. Or, il faut de 10 à 20 ans à une tortue pour devenir adulte, ce qui rend la survie jusqu’à l’âge de reproduction particulièrement difficile pour ces animaux.

Tortue serpentine près d’une route achalandée

La tortue serpentine, une espèce souvent victime de la mortalité routière, pond généralement 30 œufs ou plus et peut vivre plus de 50 ans. La perte d’une seule femelle adulte représente donc la perte potentielle de 30 nouveau-nés pour cette année-là, en plus de toutes les futures pontes qu’elle aurait pu produire au fil des décennies.

Bien que de nombreuses routes soient extrêmement dangereuses pour les tortues, certaines infrastructures peuvent leur venir en aide. Par exemple, certaines routes sont munies de ponceaux conçus pour permettre à l’eau de circuler sans endommager la chaussée. Ces ponceaux peuvent aussi servir de passage souterrain aux tortues qui cherchent à traverser, leur offrant un itinéraire sécuritaire. Toutefois, ils ne sont généralement utilisés que s’ils sont accompagnés de clôtures qui dirigent les tortues vers l’entrée du ponceau. Sans ces clôtures, les tortues ont tendance à traverser la route plutôt qu’à s’engager dans un passage sombre.

Ce que fait la FCF

Clôture pour tortues installée le long d’une route particulièrement problématique au sud d’Ottawa selon les recherches de la FCF.

Depuis 2017, la Fédération canadienne de la faune mène des relevés routiers afin de repérer les endroits où des tortues sont retrouvées sur les routes. Grâce à ces centaines d’observations, il est possible de déterminer des secteurs névralgiques — des zones où l’on observe un grand nombre de tortues sur les routes. Ce sont ces sites qui nécessitent la mise en place urgente de mesures d’atténuation.

Les espèces de tortues recensées sont également prises en compte, car certaines sont jugées plus à risque que d’autres. C’est le cas, par exemple, de la tortue mouchetée, une espèce fréquemment victime de la mortalité routière et qui est inscrite comme espèce en voie de disparition au Canada et à l’échelle mondiale.

La FCF collabore avec le gouvernement de l’Ontario ainsi qu’avec des administrations locales pour encourager l’installation de mesures d’atténuation dans ces zones critiques. Les clôtures pour la faune empêchent les tortues d’accéder aux routes très fréquentées et les dirigent vers des ponceaux leur permettant de traverser sous la chaussée en toute sécurité.

Grâce au travail de la FCF, des mesures d’atténuation ont été mises en place dans quatre des secteurs les plus problématiques de l’est de l’Ontario. Ces installations ont contribué à réduire la mortalité routière des tortues.

Que puis-je faire ?

La prévention de la mortalité routière est essentielle à la conservation des tortues, et le grand public peut aider de plusieurs façons.

Lorsque vous conduisez en région rurale, respectez la limite de vitesse. Vous pourrez ainsi réagir à temps si vous apercevez une tortue qui traverse la route. Si c’est le cas, vous pouvez l’aider à traverser la chaussée — à condition que ce soit sécuritaire de le faire. Garez-vous sur l’accotement, allumez vos feux de détresse et assurez-vous qu’aucun véhicule n’arrive dans un sens comme de l’autre. Il ne faut jamais mettre sa propre vie en danger.

S’il ne s’agit pas d’une tortue serpentine, il sera facile de déplacer la tortue. Utilisez vos deux mains pour saisir sa carapace de chaque côté et transportez-la jusqu’au côté de la route vers lequel elle se dirigeait. En tenant la tortue avec les deux mains, vous réduisez le risque de l’échapper si elle gigote ou vous griffe. La tortue pourrait tenter de se défendre en urinant — ne vous inquiétez pas si cela se produit. Dans le cas d’une tortue serpentine, il est préférable de la déplacer à l’aide d’une pelle, en la soulevant doucement et en la transportant du côté voulu.

Vous pouvez également signaler votre observation en l’ajoutant à iNaturalist Canada. En prenant simplement une photo de l’espèce et en indiquant où elle se trouve, vous contribuez à une base de données précieuse qui permet aux scientifiques de cerner les secteurs à fort taux de mortalité et d’agir en conséquence.

Les tortues ont fait partie de ces écosystèmes bien avant les humains, mais elles ont beaucoup souffert des activités humaines. Si des menaces comme les changements climatiques sont complexes, la mortalité routière est une menace évitable. La FCF est déterminée à assurer la conservation des espèces de tortues partout au Canada.

À propos de John Hopper

John Hopper est journaliste étudiant au Collège Algonquin. Il milite en faveur d’infrastructures durables comme les pistes cyclables, les espaces verts et le transport en commun. Pendant ses temps libres, il aime lire et faire de longues promenades.