« … Nous devons notre existence à une couche de terre arable de six pouces et au fait qu’il pleut. »

Cette citation est attribuée avec un certain doute au regretté Paul Harvey, journaliste et commentateur agricole à la radio américaine. Après quelques instants de réflexion, cela se vérifie.

Tout ce que nous mangeons pousse dans la terre ou mange ce qui pousse dans la terre. Sans terre, qui est une couche organique de vie bouillonnante, nous aurions de graves problèmes.

Cela est d’autant plus vrai qu’aujourd’hui. La combustion de combustibles fossiles soutire du carbone qui a été piégé profondément dans la terre pendant des millions d’années. Cette pratique a dépassé la capacité naturelle de la Terre à gérer le carbone, à la fois sur terre et dans les océans. Par conséquent, de vastes tonnes de carbone tournent dans l’atmosphère, comme un jet commercial, au-dessus d’un aéroport, attendant une occasion d’atterrir. Pendant ce temps, le carbone emprisonne la chaleur solaire dans notre atmosphère, réchauffe la planète et modifie notre climat.

Les sols des prairies comme entrepôts de carbone

Les graminées ont de longues racines et jusqu’à 70 % de ces plantes poussent sous terre. Cela permet à leurs racines d’absorber le carbone de l’air et de le stocker dans le sol.

Cette possibilité pourrait bien se trouver dans la mince couche du sol des prairies. Les chiffres varient et les calculs sont complexes, mais le sol sous les prairies indigènes des grandes plaines du Canada stocke 50 tonnes de carbone par acre de terre (environ 124 tonnes par hectare). Par conséquent, il suffit de quelques fermes de prairies indigènes bien gérées pour absorber et retenir le carbone annuel émis par une province moyenne des Prairies. C’est ce qu’on appelle une « solution fondée sur la nature », où au lieu de chercher une solution technologique pour gérer le carbone et le changement climatique, nous donnons à la Terre les moyens d’intervenir et de faire ce que les parents font trop souvent – nettoyer les dégâts de leurs enfants.

Le processus est simple. Les plantes « inspirent » le dioxyde de carbone de l’air, l’incorporent dans leurs tissus et expirent de l’oxygène; ce processus fait partie de la photosynthèse. Dans les prairies, une grande partie de ce tissu se trouve principalement dans les racines sous terre. Les racines poussent, meurent, se décomposent, et une grande partie de ce carbone reste dans le sol, peut-être pendant des siècles si on le permet. Les sols des prairies ont été appelés une « voûte de carbone ». Bien sûr, toutes les plantes accomplissent cela, mais la croissance rapide des plantes des prairies et leur large distribution mondiale font de celles-ci des entreposeuses de carbone particulièrement efficaces.

Si seulement c’était vraiment aussi simple que cela. La quantité de carbone que les sols de prairies peuvent contenir, la rapidité avec laquelle ils peuvent le « capturer » et la quantité qu’ils dégagent (parce que cela arrive aussi) dépend de la façon dont ce sol est géré. Avant la colonisation européenne, les sols des prairies étaient gérés par les peuples autochtones et les vastes troupeaux d’espèces sauvages qui y vivaient. Les feux allumés par les Premières Nations, ainsi que les excréments d’animaux, ont contribué à recycler le carbone et à produire la matière organique du sol à des niveaux probablement jamais vus depuis.

Maximiser la capture du carbone en agriculture

Depuis, la gestion des sols a brisé ce cycle important. Le défoncement du gazon, ce processus utilisé par les colons pour convertir les prairies indigènes en terres cultivées en labourant le sol, libérait au moins un tiers du carbone du sol dans l’air. La culture annuelle, où le sol est labouré chaque année pour faire pousser des céréales, des graines oléagineuses ou des légumineuses (lentilles, pois, soja), réduit davantage le carbone du sol ainsi que la capacité du sol à capturer le carbone. Les plantes qu’on laisse pousser plus longtemps capturent plus de carbone. Cela veut dire que la gestion des terres qui laisse place aux cultures vivaces, comme le foin ou les prairies artificielles, améliore la quantité de carbone qui peut être stockée dans le sol. Mais l’étalon-or reste la prairie indigène. La prairie indigène, qu’elle soit pâturée, en repos ou même brûlée, contient plus de carbone que tout autre type de gestion des sols.

Là où il y a des défis, il y a des possibilités. Même s’il a été labouré pendant des années, le sol des prairies conserve sa capacité à séquestrer le carbone. En effet, les prairies indigènes qui ont été bien gérées peuvent être saturées de carbone et elles ont peu de capacité à en stocker davantage. Cela veut dire que la plus grande possibilité de capturer le carbone réside maintenant dans les sols des cultures et des pâturages qui sont actuellement pauvres en carbone, mais qui, avec une gestion appropriée, peuvent vraiment commencer à le capturer.

L’engagement de la FCF envers les solutions fondées sur la nature

John Wilmshurst, gestionnaire de la conservation des prairies indigènes de la FCF, mène le combat dans le cadre du Canadian Grasslands Project.

Les solutions naturelles au changement climatique nous attendent. À la Fédération canadienne de la faune, nous explorons beaucoup de ces possibilités, en mettant l’accent sur la recherche de solutions gagnantes pour tous; à savoir des endroits où la réduction des émissions ou le stockage du carbone profite également à la biodiversité. Notre partenariat avec Agriculture et Agroalimentaire Canada dans le cadre du programme Laboratoires vivants est l’une de ces possibilités. Vous entendrez beaucoup parler de ces efforts de notre part pour les années à venir.